mercredi 24 juillet 2013

Ma grand-mère russe et son aspirateur américain de Meir Shalev

 240 pages
  • Editeur : Gallimard (30 mai 2013)Collection : Du monde entier

S’il n’avait pas plu ce jour de 1946, jamais Batya Ben-Barak, jeune fille de 18 ans née à Nahalal n’aurait rencontré à Jérusalem Yitzhak Shalev, enseignant épris de poésie. Jamais ces jeunes gens issus de mondes opposés ne se seraient mariés. Jamais Meir Shalev ne serait né, ou alors il aurait été un autre… 

De cette prise de conscience précoce instillée en lui par son père naît sans doute le regard particulier, attentif, curieux, étonné qu’il pose sur le monde. Au centre du récit, la grand-mère maternelle, 

Tonia, petite femme énergique et autoritaire épousée en secondes noces par Aharon Ben-Barak, tous deux originaires d’Ukraine et arrivés à Nahalal lors des seconde et troisième alya
*Installés dans un moshav, une communauté agricole sioniste et socialiste de Galilée, ils mènent une vie active et rude, rythmée par le travail de la terre et le ménage. Car Tonia vit dans l’obsession de la propreté et, entre la préparation des repas, se livre à un combat sans merci contre la poussière. 

Or l’oncle Yeshayahou, qui a choisi le capitalisme en émigrant en Amérique, introduit perfidement dans la famille l’ennemi, le cheval de Troie sous la forme d’un aspirateur ultra-moderne et puissant qui devient l’objet d’une fascination collective. Tonia est tentée par l’appel de la modernité jusqu’au moment où elle comprend que la poussière absorbée se cache dans le ventre du svieeper monstrueux. 

La force de ce récit dépasse la simple saga familiale. Il s’inscrit en effet dans un contexte politique et social particulier qui résonne avec l’actualité de façon saisissante. Si Tonia et Aharon ont été chassés d’Ukraine par les dramatiques événements que nous savons et par l’antisémitisme pathologique de l’Europe de l’Est, la tragédie n’est évoquée qu’en filigrane. Leur installation dans leur village, leur mission de pionniers à la conquête d’une terre aride qu’il s’agit d’exploiter au mieux sont difficiles. 

Meir Shalev connaît le prix du travail acharné accompli par la génération de ses grands-parents et aborde avec sincérité de nombreux aspects sociaux et politiques soulevés par la situation : la pauvreté, la cohabitation avec les voisins musulmans, l’opposition entre les cultivateurs et les intellectuels (représentés par Yitzhak, le père de Meir, accepté avec réticence par sa belle-famille). 

La narration se déploie avec fantaisie et humour en une chronologie parfois perturbée par des retours en arrière. Centrée sur le personnage de la grand-mère, la chronique familiale ménage des surprises et des rencontres étonnantes. Un objet banal se charge d’un pouvoir maléfique : Tonia vainc le Hoover, monstre des temps modernes, l’enferme et en fait un mystérieux objet de convoitise. 

L’énigme de l’aspirateur ne sera résolue qu’à la mort de la grand-mère. Ainsi, la légèreté du ton adoucit l’âpreté de la situation. Le récit de Meir Shalev, farci de tendresse et d’émotion, nous entraîne dans une fantaisie d’autant plus réjouissante qu’elle est ancrée dans la réalité. - page des libraires

ChallengeCoupsDeCoeur2013.jpg lecture commencée le 13/07/2013

Roman autobiographique, saga familiale, qui débute en 1890 à Makarov, Ukraine. Le récit grouille d’anecdotes amusantes et touchantes dont l’auteur lui-même ne garantit pas la véracité...

Une écriture vive et alerte, pas de temps mort, on passe du rire aux larmes, un pur moment de plaisir cette lecture ! 


Ce livre raconte effectivement l’histoire réelle d’une famille qui possède un grand sens de l’humour. Elle l’utilise d’ailleurs dans des circonstances étranges, puisqu’elle est susceptible de pleurer à un mariage et de raconter une blague à un enterrement. 
Ce mélange bizarre m’est parfaitement naturel. Il est aussi lié à l’Europe de l’Est, dont sont originaires mes grands-parents. Ce sont eux qui m’ont transmis cette tradition de l’autodérision. A l’instar de Woody Allen, j’ai hérité de l’humour juif. - l'arche mag
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Drapeau Israëlmoshav de Nahalal

C’est au nord d’Israël, dans la plaine fertile de Jezréel, bordée à l’est par le lac de Tibériade et le Jourdain et à l’ouest par la Méditerranée, que s’établirent les premières moshav. Ces fermes collectives inspirées de l’idéologie socialiste et sioniste, créées durant la seconde vague d’immigration juive au cours du XIXe siècle, ont joué un rôle très important dans la création de l’État d’Israël. 

Contrairement aux principes qui prévalent dans les kibboutz, les fermiers des moshav conservent la propriété de leurs biens, mais ils partagent la main-d’œuvre, les ressources naturelles (l’eau par exemple), et les profits issus de leurs activités sont reversés à la communauté. La famille est au centre de la vie sociale de ces villages coopératifs, et les enfants bénéficient d’une éducation gratuite et de haut niveau. 

Cependant, depuis la crise économique et politique des années 1980, les écoles ont du mal à accueillir tous les enfants, et de plus en plus de membres des moshav sont employés dans des secteurs non agricoles ou partent travailler dans les villes les plus proches. Dans le contexte actuel d’instabilité financière, de mondialisation et de libéralisme généralisé, l’expérience de ces formes de production collectives et solidaires est intéressante à bien des égards. - Yann Arthus Bertrand

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