samedi 9 novembre 2013

Au revoir là-haut de Pierre Lemaitre

 576 pages
 excellent
  • Editeur : ALBIN MICHEL (21 août 2013)
  • Prix des libraires de Nancy Le Point, 2013
  • Roman français préféré des libraires à la Rentrée, 2013
  • Prix Goncourt 2013
Rescapés du chaos de la Grande Guerre, Albert et Edouard comprennent rapidement que le pays ne veut plus d'eux.
Malheur aux vainqueurs ! La France glorifie ses morts et oublie les survivants.
Albert, employé modeste et timoré, a tout perdu. 
Edouard, artiste flamboyant devenu une « gueule cassée », est écrasé par son histoire familiale. Désarmés et abandonnés après le carnage, tous deux sont condamnés à l'exclusion. Refusant de céder à l'amertume ou au découragement, ils vont, ensemble, imaginer une arnaque d'une audace inouïe qui mettra le pays tout entier en effervescence... Et élever le sacrilège et le blasphème au rang des beaux-arts.

Bien au delà de la vengeance et de la revanche de deux hommes détruits par une guerre vaine et barbare, ce roman est l'histoire caustique et tragique d un défi à la société, à l'Etat, à la famille, à la morale patriotique, responsables de leur enfer. Dans la France traumatisée de l'après guerre qui compte son million et demi de morts, ces deux survivants du brasier se lancent dans une escroquerie d'envergure nationale d'un cynisme absolu.

Première Guerre mondiale : au poste de secours sur la Suippe devant Auberive (Haute-Marne), novembre 1915 (Paris, Musée d'Histoire Contemporaine, Hôtel des Invalides). (©DeAgostini/Leemage) lecture de novembre 2013
 excellentun roman réellement impressionnant ! impossible de le lâcher avant la fin. Le destin de trois homme de retour de la guerre, leur reprise pied plus ou moins réussie dans la vie civile, où tous d'aspire qu'à une chose, oublier. Mais comment oublier lorsqu'on a été enterré vivant après l'éclat d'un obus, ou quand un obus vous a défiguré ? et comment reprendre sa vie ordinaire ? impossible, tout comme la vengeance ou le pardon. 
L'écoeurement vous prend lorsque l'on voit à quelle vitesse ces hommes ont été oubliés, les magouilleurs de cimetières, cyniques et prêt à toutes les bassesses envers les morts. Tout n'est pas vrai dans ce roman, et pourtant une grande partie est basée sur des faits réels. 
Juste une petite déception sur la fin avec la dernière rencontre du père et du fils. Paraît vraiment peu réaliste ce hasard... 

Novembre 1918. Édouard Péricourt est fils de la haute bourgeoisie industrielle. il est homosexuel, fantasque, veinard et dessinateur de génie. Albert Maillard est comptable, humble par profession et ne voit guère plus loin que les jupons de sa Cécile. Rien en commun, donc, si ce n'est la mitraille et la vie des tranchées, jusqu'à ce que leur chef de régiment, le lieutenant Pradelle, ne brise la vie de l'un et l'autre au cours du même assaut, à quelques jours de l'armistice. Dans une France où tout un commerce nauséabond prospère sur le traumatisme de la Grande Guerre et le culte des poilus, Édouard et Albert montent ensemble une arnaque scandaleuse, géniale et terriblement risquée.- lepoint

illustration : Première Guerre mondiale : au poste de secours sur la Suippe devant Auberive (Haute-Marne), novembre 1915 (Paris, Musée d'Histoire Contemporaine, Hôtel des Invalides).

Lemaître y réussit pourtant en prenant pour héros, non pas les morts devant lesquels les drapeaux s'inclinent, mais les survivants à qui la France hystérique et névrosée des Années folles tournera vite le dos, les oubliés, les humiliés. Les revenants, car ce sont des fantômes.
Albert, homme-sandwich sur les boulevards ou liftier en costume d'opérette à la Samaritaine, se dévoue à Edouard, son compagnon d'armes qui lui a sauvé la vie au péril de la sienne. Au cours de cette action, Edouard a eu la moitié du visage emportée par un obus. Il ne peut plus parler. Dessinateur surdoué, c'est par le truchement de son crayon qu'il converse avec son ami, et qu'il imagine avec lui l'escroquerie qui les vengera de l'ingratitude ambiante. Pour un profit à l'image même du roman : monumental. - bibliobs
 Pourquoi l'histoire des " Gueules Cassées " ne commence-t-elle réellement qu'avec la " Grande Guerre " de 1914-1918 ?
Pour deux raisons essentielles :
  

Par rapport aux guerres du siècle précédent, le nombre de blessés et la nature des blessures ont radicalement changé.


 Il faut rappeler le nombre incroyable et jamais vu jusqu'alors des pertes de cette guerre.
1 400 000
 morts français
2 040 000
 morts allemands
850 000
 morts anglais
114 000
 morts américains
1 700 000
 morts de l' empire russe
1 500 000
 morts autrichiens hongrois.
En Europe, au lendemain de la guerre, on compte environ 6,5 millions d' invalides, dont près de 300 000 mutilés à 100 % : aveugles, amputés d'une ou des deux jambes, des bras, et blessés de la face et/ou du crâne.

L'emploi massif des tirs d'artillerie, les bombes, les grenades, le phénomène des tranchées où la tête se trouve souvent la partie du corps la plus exposée ont multiplié le nombre des blessés de la face et la gravité des blessures.

Les progrès de l'asepsie et les balbutiements de la chirurgie réparatrice permettent de maintenir en vie des blessés qui n'avaient aucune chance de survivre lors des conflits du 19ème siècle.



Quelle vie après la survie ?


Ces broyés de la guerre gardent la vie, mais c'est pour vivre un nouveau cauchemar.


Les regards, y compris parfois, ceux de leur famille, se détournent sur le passage de ces hommes jeunes, atrocement défigurés.


Ils ont honte de se montrer, ils ne savent où aller. Ils sont sans travail et rien n'a été prévu pour eux. Ni foyer entre deux opérations, la reconstruction du visage pouvant nécessiter plusieurs années, ni pension, car à cette époque la blessure au visage n'est pas considérée comme une infirmité et n'entraîne donc aucun droit à pension d'invalidité.


C'est dans cet abîme de détresse que quelques-uns d'entre eux, refusant le désespoir et la pitié, s'élevèrent au-dessus de leur condition de mutilé pour proclamer leur humanité.


Le 21 juin 1921, à l'initiative de deux « grands mutilés», Bienaimé Jourdain et Albert Jugon, une quarantaine de soldats blessés au visage créent l'Union des Blessés de la Face, qu'ils surnomment les " Gueules Cassées " :

Ils en confient la présidence au Colonel Yves Picot.

leur devise " Sourire quand même ",

leur arme, la Solidarité.

Une solidarité sans faille qui a permis d'assurer à leurs camarades, sans jamais demander la moindre aide à l'Etat, une vie digne des sacrifices qu'ils avaient consentis au nom de la France.


Ce combat sans fin se poursuit aujourd'hui. Dans une totale fidélité à ses initiateurs, il s'est élargi à d'autres souffrances, à d'autres misères humaines. - gueules-cassees.asso


livre en cours son oeuvre :
série policière Verhoeven : 
  • Travail soigné, Éditions du Masque, « Masque » - Prix du premier roman du festival de Cognac, 2006
  • Alex, Albin Michel, févr. 2011, 392 p. - Prix des lecteurs policier du Livre de poche, 2012 - CWA International Dagger, 2013
  • Les Grands Moyens, feuilleton numérique comprenant le texte enregistré par l'auteur. 
  • Sacrifices, Albin Michel, 2012 
  • Rosy & John, Le Livre de Poche Thrillers, 2013, 141 p.
autres romans :

  • Robe de marié, Calmann-Lévy, coll. « Suspens », 2009 - Prix des lectrices Confidentielles, 2009 - Prix Sang d'encre et Prix des lecteurs Goutte de Sang d'encre, Vienne, 2009 - Prix du polar francophone de Montigny les Cormeilles, 2009
  • Cadres noirs, Calmann-Lévy, 2010  - Prix Le Point du polar européen, 2010
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Challenge régions Aspho 2013_2

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